Fake News. La cérémonie parodique a également accueilli Raheem Kassam, rédacteur en chef du site Breitbart London. Source : Valeurs Actuelles, 13/03/2018
C’est du jamais vu. Face au Grand Rex, une queue de plusieurs dizaines de mètres courait, lundi soir, devant le Théâtre du Gymnase, dans le 10e arrondissement de Paris, où avait lieu la 9e cérémonie (parodique) des Bobards d’Or, qui récompense chaque année « les meilleurs des journalistes, c’est-à-dire ceux qui n’hésitent pas à mentir délibérément ou à colporter des bobards pour servir le politiquement correct », selon Jean-Yves Le Gallou, président de la Fondation Polémia, en charge de l’organisation. « Il y a 700 personnes dans la salle ce soir, 40 selon l’AFP », s’est-il félicité sous les applaudissements d’un public enthousiaste.
Parmi les invités, Raheem Kassam, rédacteur en chef du site Breitbart London, l’antenne britannique du média conservateur américain dirigé un temps par Steve Bannon, l’ancien conseiller de Donald Trump, a fait sensation. « Après avoir assisté aux Bobards d’Or l’an passé, je me suis rendu dans l’aile ouest de la Maison Blanche. Ils ont adoré l’idée, a‑t-il raconté. Ils voulaient organiser un événement similaire. Le président Trump a commencé alors par dénoncer les Fake News sur Twitter ». En janvier, il décernait même ses prix sur le site du parti républicain. « Les valets des médias de l’establishment veulent tuer nos idées, mais aussi nous voir morts », a poursuivi l’ex-conseiller de l’eurodéputé Nigel Farage.
« Yann Moix est dans la salle ? »
« Un jour, les Américains érigeront à Washington une statue en l’honneur de Jean-Yves Le Gallou », a même conclu l’activiste anglais, en lançant un « Vive la France » à son auditoire. Auparavant, un des maîtres de cérémonie et patron de TV Libertés, Martial Bild, avait présenté les membres du jury, dont Gabrielle Cluzel (Boulevard Voltaire), Edouard Chanot (Sputnik France) et Caroline Parmentier (Présent). La sélection des 14 bobards, où l’AFP rebaptisée « l’Agence France Presque » figurait en bonne place, comprenait notamment le « Bobard point de vue : Toulouse, le bain de foule de Macron était bidon (France 3 — AFP) », le « Bobard poupées russes » : des migrants qui font baisser le vote FN ? (Europe 1) et le « Bob’arabo-musulman : Marine Le Pen descendante de Mahomet selon l’AFP », qui a suscité l’hilarité générale.
Parmi les cinq mensonges finalistes, sélectionnés par les votants sur Internet, c’est le « Bobard Yann Mhoax : Moix invente des preuves pour défendre les migrants de Calais », qui a remporté le Bobard d’Or à l’applaudimètre. Comme Emmanuel Macron, l’écrivain a été copieusement hué. « Yann Moix est dans la salle ? », a alors demandé un présentateur. « Et Théo, il est là ? », a renchéri un spectateur. A quelques voix près, le Bobard d’Argent est justement revenu au « Bobard Matraquage : l’affaire Théo, un bobard d’Etat ». Les soutiens du showbiz du jeune homme ont été aussi conspués. Tout comme François Hollande qui l’a visité à l’hôpital. « Quel gros con ! », a même lâché un spectateur.
Standing ovation pour « l’Agence France Presque »
Caroline Parmentier a, elle, dénoncé « la victimisation systématique des racailles » par les médias tout en rappelant que l’ancien président de la République ne s’était pas rendu au chevet des policiers agressés à Viry-Châtillon, dans l’Essonne, en octobre 2016. Enfin, le Bobard de Bronze a été attribué sous les rires au « Bobard Protéine : le bobard pur bœuf de Lisa Beaujour, Nora Bouazzouni et Aude Lancelin », qui avaient défendu la thèse fumeuse selon laquelle les hommes sont plus grands en moyenne que les femmes car ils les ont privées de protéines depuis le paléolithique. « Les femmes ont les cheveux plus longs parce que les hommes les tiraient par la tignasse », s’est alors moquée Gabrielle Cluzel.
Pour terminer, un prix spécial du jury a été décerné à l’AFP « pour sa présence constante parmi nous au fil des années » et saluée par une (très courte) standing ovation. Puis, trois représentants de la « Réinfosphère » — Claude Chollet de l’OJIM, Michel Janva du Salon Beige et Yann Vallerie de Breizh-Info — ont présenté leur média pour récolter des fonds. Enfin, Jean-Yves Le Gallou est arrivé sous les clameurs pour clôturer la cérémonie. « Le parti des médias et le parti de Macron se confondent », a‑t-il déclaré, ironisant sur « la souffrance » des journalistes insultés et maltraités. Avant de leur livrer 15 conseils, parmi lesquels : « Posez-vous la question : suis-je un contre-pouvoir ou un instrument du pouvoir ? », « rendez compte de la complexité des faits », « évitez le deux poids deux mesures » ou « évitez de hurler avec les loups ».
« On va essayer de vivre ensemble. Mais ne faites pas confiance aux médias officiels, informez-vous sur les médias alternatifs », a‑t-il conclu. « C’est un grand succès de foule, qui est révélateur de la méfiance grandissante vis-à-vis des médias du système », a confié à Valeurs actuelles le président de la Fondation Polémia, reconnaissant toutefois « une glaciation des médias dans des points de vue idéologiques de plus en plus caricaturaux et une absence totale de recul ». Rasséréné par la « montée en puissance des sites de réinformation », Jean-Yves Le Gallou redoute désormais « la censure privée des grands réseaux sociaux », comme Facebook et Twitter, « très préoccupante et contre laquelle il n’y a aucun moyen de se défendre ».