Bobard technologique : Yann Barthès fait son cinéma

Bobard technologique : Yann Barthès fait son cinéma

22 février 2016 | Bobards d'Or 2016

Le Petit Journal, mauvaise graine et graine d’espion, utilise des moyens à la limite de la déontologie pour obtenir des informations personnelles sur le député européen du Front National Bruno Gollnisch. Téléobjectif ou micro perche, tous les moyens sont bons pour aller à la pêche aux ragots. Et tout nier en bloc ensuite, bien sûr.

[colored_box bgColor=“#f9d309” textColor=“#333333”] Can­di­dat : Yann Barthès[/colored_box]

Le 1er mai 2015 se tenait la mani­fes­ta­tion annuelle du Front Natio­nal, place de l’Opéra à Paris. Le Petit Jour­nal de Yann Bar­thès envoie sur place deux équipes com­po­sée de trois per­sonnes. C’est l’histoire d’un désa­mour entre Le Petit Jour­nal et la droite natio­nale, c’est l’histoire d’un faux mélo­drame qui cache une vraie farce. C’est l’histoire d’un bobard qui se décline en cascade.

Dans le pre­mier tableau nous trou­vons une équipe de repor­ters du Petit Jour­nal. L’équipe est com­po­sée d’un jour­na­liste, d’un came­ra­man et d’un per­chiste. Tout ce petit monde est aux aguets : il faut don­ner du conte­nu pour les pro­chaines éditions.

Pour ce faire, la méthode est simple : on filme à la volée tout ce qui peut faire de l’audience… et les cor­res­pon­dances pri­vées ne sont pas à exclure. Bru­no Goll­nisch semble une cible pri­vi­lé­giée : le jeu­di 16 avril, au Par­le­ment euro­péen, il a été vic­time de ce pro­cé­dé dou­teux. Le Petit Jour­nal a en effet fil­mé puis lu une cor­res­pon­dance pri­vée de ce parlementaire.

Et encore, s’il n’y avait que le cour­rier ! Le Petit Jour­nal aime aus­si cap­ter des conver­sa­tions pri­vées à l’aide d’une perche micro. Bru­no Goll­nisch le sait. Le 1er mai, il consent à don­ner un entre­tien mais à la condi­tion que Le Petit Jour­nal arrête ces cap­ta­tions déloyales à la sauce barbouze.

Pour­tant, mal­gré leurs pro­messes, les jour­na­listes de Canal+ conti­nuent d’u­ti­li­ser leur perche micro et de cap­ter des conver­sa­tions en lou­ce­dé. C’en est trop pour le dépu­té euro­péen, qui s’empare de la perche à l’aide d’un para­pluie et brise le micro.

Le soir même, Chris­tophe Hon­de­latte va deman­der à Bru­no Goll­nish de se jus­ti­fier de son acte : ils « se pro­mènent avec un micro direc­tion­nel, micro spé­cial pour cap­ter les chu­cho­te­ments, afin de cap­ter des conver­sa­tions pri­vées ». BFMTV le 01/05/2015

Inter­ro­gé par Lea Sala­mée le 4 mai 2015, Yann Bar­thès va jouer la vierge effa­rou­chée, en confon­dant les types de micro mais aus­si leurs capa­ci­tés : « Des micro direc­tion­nels pou­vant cap­ter des chu­cho­te­ments [….] On n’a pas de micro mul­ti­di­rec­tion­nel spé­cial pour chuchotement. »

Pour pré­ci­sion, voi­ci le sché­ma ci-des­sous des capa­ci­tés de cap­ta­tion d’un micro mul­ti­di­rec­tion­nel appe­lé aus­si micro car­dioïde (à gauche) : c’est le micro qui se cache sous la bon­nette estam­pillée Petit Jour­nal. Il peut cap­ter des chu­cho­te­ments à une bonne dizaine de cen­ti­mètres. À droite, le sché­ma d’un micro direc­tion­nel dit aus­si super-car­dioïde. On trouve ce type de micro au bout des perches. C’est ce type de micro que Bru­no Goll­nish a brisé.

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Ce type de micro est capable de prendre un son à envi­ron 2,50 m. Or une perche a une lon­gueur de 2,50 m. Un ingé­nieur du son pour­rait donc cap­ter un chu­cho­te­ment à envi­ron 4 mètres. Goll­nisch dit donc vrai mais ce n’est pas grave : Le Petit Jour­nal a des images cocasses à mon­trer, il peut enfin faire son émission.

Et la comédie ne s’arrête pas là

Après l’incident avec le dépu­té Goll­nisch, la sécu­ri­té du Front Natio­nal exfiltre une équipe du Petit Jour­nal : sont concer­nés Boris Bal­duc­ci, Clé­ment Bre­let et Paul Lar­rou­tu­rou. Selon Yann Bar­thès, ils auraient été tabas­sés. Yann Bar­thès voit là l’oc­ca­sion de réa­li­ser ses fan­tasmes d’ac­teur et ouvre son édi­tion du 4 mai le visage tumé­fié, ensan­glan­té. Du cabo­ti­nage consi­dé­ré comme un des beaux-arts.

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Oyez, oyez : des jour­na­listes ont été agres­sés ! Le Petit Jour­nal devient le centre de l’attention médiatique

Le 4 mai, au micro de France Inter, Yann Bar­thès va évo­quer des équipes « inco­gni­to ». Les jour­na­listes agis­saient sans la bon­nette rouge du Petit Jour­nal. L’agression des jour­na­listes en devient d’autant plus grave. Elle ne vise plus uni­que­ment Le Petit Jour­nal mais l’ensemble de la pro­fes­sion jour­na­lis­tique et, par exten­sion, la liber­té d’expression.

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Sauf, que dans son édi­tion du 4 mai « spé­cial 1er mai », Le Petit Jour­nal va dif­fu­ser des images de la mani­fes­ta­tion où les deux équipes posent des ques­tions aux mili­tants avec la bon­nette du Petit Jour­nal. Pour l’in­co­gni­to, on repassera !

Et puis, il faut une preuve de l’agression. Par chance la scène a été fil­mée. Enfin mani­fes­te­ment pas assez bien pour mon­trer l’agression des trois jour­na­listes… Caram­ba, encore raté ! Ni une ni deux, Le Petit Jour­nal va uti­li­ser le même extrait vidéo pour pré­sen­ter deux vic­times dif­fé­rentes, Paul Lar­rou­tu­rou et Clé­ment Bre­let.

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Le lun­di matin, invi­té sur France Inter, Yann Bar­thès donne des nou­velles de ses jour­na­listes : « Ils vont beau­coup mieux. Ils ont eu des cour­ba­tures dimanche mais ça va mieux. »

De simples cour­ba­tures domi­ni­cales ? Pour un pas­sage à tabac ? Le Petit Jour­nal offre – enfin ! – un scoop : il emploie des surhommes !

À moins que… Non ? Tous ces bobards et cette mise en scène pour de simples cour­ba­tures ? Yann Bar­thès, vrai­ment, bra­vo pour ce mélo­drame comique et ces bobards en cas­cade. Encore une fois, vous méri­tez d’être récom­pen­sé… Soyez fier de vous voir décer­ner ce bobard !

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